SARNATH

SARNATH
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La zone archéologique de S rn th se trouve à une lieue environ au nord de Bénarès. Le site, désigné dans l’Antiquité sous le nom de «parc aux Gazelles», vit le Buddha prêcher pour la première fois les «nobles vérités» (531 ou 523? avant notre ère). Cinq assistants seulement recueillirent alors ses paroles, d’anciens compagnons du temps où il croyait trouver dans la pratique des austérités le chemin de la Délivrance. Abandonné par eux pour avoir renoncé à de vaines macérations, le Bienheureux avait médité dans la solitude à Bodhgay , atteint l’Éveil complet et conçu sa doctrine. Après quoi, à la demande expresse des dieux, il s’était mis en route vers la cité sainte de l’hindouisme, auprès de laquelle séjournaient ceux qui allaient bientôt former le premier noyau de la communauté, afin de leur dispenser son enseignement.

Histoire et description du site

Le message du Buddha se répandit rapidement et les disciples se multiplièrent. À S rn th, un ordre de moines mendiants fut créé, la congrégation s’organisa. Les bâtiments conventuels se développèrent autour de la cellule qu’avait occupée le Maître. Le temple principal, dit jadis «cellule parfumée des origines», en marqua plus tard l’emplacement, dans la partie ouest du site. Transformé plusieurs fois au cours des âges, il fut vraisemblablement détruit par les Huns (fin du Ve s. ou début du VIe s.) puis, après qu’ils eurent disparu de la contrée, il fut reconstruit en briques et en pierres de remploi. Tel que nous le font connaître aujourd’hui ses vestiges, il s’élevait sur une terrasse carrée. Avec sa cella , carrée elle aussi, son porche et ses trois chapelles extérieures saillantes, il couvrait un plan en forme de croix grecque. Le sanctuaire supportait sans doute la haute superstructure caractéristique des temples du Nord dès le début de la période post-Gupta – légèrement curviligne et couronnée d’un ornement côtelé, image démesurément grossie du fruit de l’Emblique myrobolan ou malaka – et recouverte de cuivre doré: c’est du moins ce que laisse supposer, d’une part, l’épaisseur des murs et, d’autre part, une description laissée par le moine chinois Xuanzang qui visita S rn th vers 637. À l’ouest de ce temple, là où l’on suppose que le Bienheureux prononça le premier sermon, l’empereur Açoka, au IIIe siècle avant notre ère, érigea un pilier monolithe en grès. Le fût poli, primitivement haut d’une quinzaine de mètres, porte un édit impérial flétrissant les schismatiques; deux autres épigraphes y furent gravées ultérieurement (périodes Kus n et Gupta). Quant au chapiteau, premier chef-d’œuvre de la sculpture indienne et orgueil du musée local, il se compose d’un lotus renversé, «campaniforme»; d’un abaque où alternent quatre animaux de profil, d’un naturalisme vigoureux, avec des roues symbolisant la Loi bouddhique ; enfin, d’un groupe de quatre protomés de lions fièrement campés qui soutenaient jadis une énorme roue dressée. Si l’on en croit le témoignage du pèlerin Faxian, il existait au début du Ve siècle quatre importants st pa (tumulus de maçonnerie pleine renfermant des reliques). Nous n’en connaissons que deux. L’un est le Dharmar jika, construit par Açoka, au sud du temple principal plusieurs fois agrandi, et éventré au XVIIIe siècle; la petite balustrade taillée en un seul bloc qu’abrite, avec un st pa en réduction, une chapelle toute proche, proviendrait de son sommet. L’autre st pa , de taille imposante, est le Dhamekh, qui domine, au sud, l’aire archéologique. De fondation ancienne, il fut à la période classique (VIe ou VIIe s.?) amplifié et habillé de pierres, tenues par des crampons de fer; il a, depuis ces travaux, l’aspect d’une tour octogonale, percée de niches qu’occupaient des statues et ceinturée d’une frise sculptée de motifs floraux et géométriques fort gracieux, semblables à ceux qui furent peints sur certains plafonds à Ajan レ . L’examen des vestiges de structures de toutes sortes et d’époques diverses, particulièrement denses à l’ouest du site, permit de distinguer sept monastères (vih ra ). Là vivaient, au temps de Xuanzang, quinze cents religieux qui se réclamaient de sectes du Ther vada (Sarv stiv din et Sammat 稜ya). Certains historiens supposent que S rn th est entré en léthargie au début du IXe siècle. Mais, peu avant 1150, une reine de Kanauj bâtit (ou rebâtit) un monastère au nord, le Dharmar jika-Jina-Vih ra; son mur méridional divise le site en deux parties inégales. En 1194, une bande turque saccagea S rn th en même temps que Bénarès: à sa tête se trouvait Qutb ud-D 稜n Aibak en personne, alors vice-roi de Delhi (tombée aux mains des musulmans deux ans auparavant). Ainsi s’éteignit brutalement ce foyer du bouddhisme après quelque mille sept cents ans d’existence. Avec la destruction du st pa Dharmar jika commença le pillage systématique des ruines. En 1904, de sérieux travaux de fouilles et de restauration furent entrepris. Depuis, diverses organisations pieuses ont aménagé, à quelque distance des vestiges, des bâtiments destinés à accueillir les fidèles, car S rn th est resté un grand centre de pèlerinage. Un temple fondé par le Mah bodhi Society abrite notamment des reliques trouvées dans les ruines du temple principal.

Une brillante école de sculpture

Les collections lapidaires du musée archéologique de S rn th offrent un résumé de l’évolution de la sculpture dans la région gangétique, du IIIe siècle avant J.-C. au XIIe siècle de l’ère chrétienne. Elles se composent de fragments d’architecture et de statues recueillis sur le site même et aux environs. Les pièces bouddhiques constituent un ensemble exceptionnel en raison de leur homogénéité et de la perfection dont beaucoup témoignent, surtout celles de la période classique Gupta et post-Gupta (env. IVe-VIIIe s.). Les ateliers locaux bénéficièrent de la proximité de la carrière de Chun r, d’où l’on tirait un grès gris très apprécié dès la période Maurya (IIIe s. av. J.-C.). Avec le magnifique «chapiteau d’Açoka», un ensemble important de petites têtes, aux faciès et aux coiffures très différenciés (portraits de donateurs?), illustrent le style Maurya, tandis que des montants de balustrade présentent dans leur décoration de frappantes analogies à la fois avec les ouvrages de Bh rh t et avec ceux du premier style de Š ñci (env. fin du IIe s. av. J.-C.). Une grande statue en grès rouge du Bodhisattva (le Buddha C kyamuni), amenée de Mathur à S rn th, avait été dressée à l’endroit où, selon la légende, le Bienheureux aimait à méditer; elle fut consacrée par un certain frère Bala dans la troisième année du règne de Kanis ャa (147 apr. J.-C.?). Cette image puissante et rude a les traits des toutes premières effigies mathuriennes du Maître: frontalité, tête rasée, visage rond aux yeux grands ouverts, poing gauche sur la hanche et main droite (brisée) esquissant à hauteur de l’épaule nue l’abhayamudr («geste de non-crainte»), vêtement aux plis faits d’incisions parallèles, ceinture nouée. Elle jouit sans doute d’une grande considération car on voit auprès d’elle une réplique exécutée sur place en pierre de Chun r. La période Gupta vit se multiplier à S rn th des œuvres d’un équilibre parfait, alliant la robustesse à l’élégance et reflétant l’élévation de la pensée bouddhique. L’une d’elles (cf. empire GUPTA) incarne tout particulièrement l’idéal de l’esthétique indienne: le Buddha est assis à l’indienne sur un trône et de ses mains fait «tourner la roue», geste qui symbolise la prédication. Derrière lui se déploie un très grand nimbe circulaire, finement ciselé, sur lequel s’enlèvent des génies volants. Sur le socle figurent des orants – les cinq premiers disciples et une donatrice avec son enfant –, agenouillés de part et d’autre d’une roue de la Loi dressée entre deux gazelles. Du personnage, de son visage aux yeux mi-clos et au sourire à peine esquissé comme de son corps au modelé souple, visible sous l’étoffe mince d’où le drapé a disparu, émane une sereine grandeur. Debout, il adopte une attitude légèrement hanchée, gracieuse sans mièvrerie. Excellents techniciens, les artistes montrèrent néanmoins de la répugnance à traiter en ronde bosse ces idoles; se détachant d’abord en haut relief sur le nimbe géant, celles-ci allaient bientôt occuper le centre de stèles. L’iconographie du Buddha, encore incertaine dans le style de Mathur , s’était fixée avec le style Gupta. Celle des Bodhisattva, divinités compatissantes, ne cessa de s’enrichir. La complexité croissante de leurs représentations alla de pair, après la période post-Gupta, avec l’accentuation d’un certain maniérisme. Sans échapper à cette tendance, les pièces tardives de S rn th témoignent cependant d’une mesure qui fait trop souvent défaut dans les écoles médiévales bouddhiques du Bih r et du Bengale.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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